Des fourmis guyanaises au Velcro d’acier !

Une imitation de la nature
Dès 1941, George de Mestral, constatant lors d’une promenade avec son chien combien les fleurs de chardon alpin [1] étaient difficiles à se détacher de son pantalon ou du poil de son chien, a l’idée d’une nouvelle bande auto-agrippante .
- Fleur de Chardon Alpin
Une simple observation microscopique de la résilience des crochets de la fleur lui donna l’idée d’une bande auto-agrippante en nylon.
- Crochets de Arctium lappa
- En imitant les fleurs de bardane, une bande auto-aggripante a pu être mise au point
- Crochets et velours
- Enchevêtrement de crochets dans du velours (vue de détails Crédits Velcro)
En 1951, il brevètera son invention sous le nom de Vel (=velours) Cro (crochets) qui peut se résumer comme suit :
"Les crochets du chardon alpin (ou de la bardane) s’aggripent aux poils des manteaux ou de la fourrure "
qui donne l’analogie :
"Les crochets du Velcro s’aggripent à son velours".
La découverte du Velcro répond à une sérendipité authentique dans la mesure où George de Mestral ne cherchait pas à inventer quoi que ce soit mais à comprendre ses observations [2]
Sans le savoir notre inventeur avait re-découvert une symbiose étudiée en Guyane par les chercheurs de l’équipe d’Alain Dejean [3], en collaboration avec des chercheurs de Clermont-Ferrand de Toulouse et de la station biologique de Doñana en Espagne. Le Cecropia obtusa, appelé bois canon en Guyane abrite des fourmis arboricoles du genre Azteca andreae qui se logent dans les tiges creuses tandis que les ouvrières s’agripent de leurs griffes à la bordure des feuilles portant des poils formant "velours".
- Capture d’une proie
- Un sphinx capturé par une aile sur un lobe de feuille, on voit des ouvrières en position de chasse sur la droite de la photo. (Crédits.-© ECOFOG)
On y reconnait là le principe du « Velcro » ! Selon les chercheurs, une fourmis peut maintenir jusqu’à plus de 5 000 fois son poids. [4]
- Chasse sous une feuille !
- Des ouvrières en chasse sous une jeune feuille, capturent et écartèlent leur proie (Crédits.- © ECOFOG)
[5]
[6]
Dans ces conditions, George de Mestral aurait tout aussi bien pu retrouver son "brevet de la Nature " en Guyane ! Il lui aurait suffi de remarquer l’analogie entre les poils de Bardane et ceux des feuilles de bois cannon. Cependant, sa demande de brevet doit beaucoup à sa promenade avec son chien dont les "teignes" lui ont fourni l’occasion d’observer la fonction dénommée ensuite "Velcro". Aurait-il pu observer la même fonction dans la symbiose des fourmis et du bois canon ?
Une "contrefacon" d’une imitation
Du VELCRO au STEELVELCRO, on passe par simple substitution du nylon à l’acier, le principe auto-aggrippant [7] étant conservé.
"Les crochets d’acier s’aggripent au velours de la bande STEELVELCRO".
- Une imitation en acier du Velcro
- Le Steelvelcro est une contrefacon du Velcro, imitation de la nature
"Un mètre carré de Metaklett, un nouvelle attache est capable de supporter 35 tonnes de pression à des températures pouvant atteindre 800 C", affirment Josef Mair et ses collègues de l’Institut Technique de Munich. Et tout comme le Velcro, il peut être fermé et ouvert sans outillage particulier.
Les attaches par pression ont de multiples usages des bandages aux prothèses orthopédiques en passant par les cables sous-marins ou l’aéronautique. "Elles sont utilisables pour construire des facades ou pour l’assemblage de voitures", déclare Mr Mair.
Newscientist septembre 2009
[1] d’autres sources indiquent les graines de bardane (Arctium lappa)
[2] Pek van Andel, Danièle Bourcier, De la Sérendipité dans la Science, la Technique, l’Art et le Droit, L’Act MEM Libres sciences,2009, Chambery p.125
[3] du laboratoire Ecologie des forêts de Guyane (ECOFOG, CNRS/Université Antilles-Guyane/INRA/AgroParisTech)
[4] Un groupe d’ouvrières peut capturer de très grosses proies, la plus grosse rencontrée étant un criquet de 18,61 g soit 13 350 fois le poids d’une ouvrière.
[7] assimilable au "tertium comparationis" de l’analogie
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